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Une oeuvre de Frère Luc à Fourvière!
Suite à la journée d’étude autour du peintre Claude François devenu le Frère Luc, organisée par l’Association des Amis du musée de Fourvière, nous vous proposons une courte présentation du tableau exposé dans la chapelle saint Thomas Becket au sanctuaire de Fourvière qui vous donnera peut-être envie de découvrir cette œuvre et ce peintre.
Ce tableau de grandes dimensions, représentant l’Assomption de la Vierge et son couronnement, a longtemps été considéré uniquement comme un ex-voto offert par le clergé Lyonnais en 1817, dont on ne connaissait ni le peintre, ni la provenance.
Ce n’est qu’en 2015 qu’il a été identifié puis attribué officiellement comme une œuvre de Frère Luc. Appartenait-il à la riche collection d’œuvres du cardinal Fesch, oncle de Napoléon Bonaparte, évêque à Lyon au début du XIXème siècle ? C’est une hypothèse soulevée par Monsieur Bernard Berthod conservateur du musée de Fourvière. Il n’est pas non plus exclu que ce tableau ait été peint à Lyon pour le couvent des Récollets* de Lyon où se trouvaient des tableaux de Frère Luc, selon le père J.J. Danel spécialiste du Frère Luc qui est intervenu lors de cette journée.
Le frère Luc est né vers 1614 à Amiens, sous le nom de Claude François. Elève de Simon Vouet de 1631 à 1634, il part parfaire sa formation artistique à Rome de 1635 à 1639. Il réalise de nombreuses copies de maîtres notamment une Assomption de Francesco Bassano de l’église Saint Louis des Français. Raphaël, Annibal Carrache, Guido Reni ont une influence durable sur le jeune peintre. De retour en France il atteint une notoriété certaine, on lui prête une collaboration avec Nicolas Poussin. Puis en 1644, il rentre chez les Franciscains, c’est alors qu’il prend le nom de Frère Luc. La peinture se hisse pour lui au même rang que la prédication. Il est envoyé au Québec avec d’autres frères comme missionnaire. Il y réalise plusieurs tableaux. Il meurt en France en 1685. Les œuvres de Frère Luc sont nombreuses mais malheureusement peu sont datées et répertoriées.
Sur cette grande huile sur toile on peut voir la Vierge élevée et couronnée par la Sainte Trinité: Dieu le Père en blanc, Jésus à moitié couvert par ce tissu rouge évoquant sa Passion et sa gloire et le Saint Esprit représenté classiquement par une colombe. Si le dogme de l’Assomption est récent – il n’a été défini que par le pape Pie XII en 1950 – de nombreux textes officiels et apocryphes se mélangent au XVIIème siècle et sont un terreau pour la représentation de la Vierge Marie à cette époque. Ces écrits évoquent le couronnement de Marie par le Père, ou le Fils ou le Saint Esprit ou par la Trinité tout entière, ils évoquent un dialogue entre Jésus et sa mère, ils parlent de créatures célestes, d’anges musiciens, d’encens, de parfum, de lys, de colombes, de rameaux d’olivier… Certains éléments se retrouvent sur l’œuvre de Frère Luc qui a dû s’inspirer de ces textes et de toute la piété Mariale dans laquelle baignent les chrétiens du XVIIème siècle. L’ordre franciscain, auquel Frère Luc appartient, contemple particulièrement l’humanité du Christ où Marie tient une place privilégiée et l’on retrouve très souvent ce thème (assomption, couronnement de la Vierge) chez les franciscains, soit dans les écrits, soit comme ici dans la représentation artistique.
On voit la Vierge au centre habillée d’un manteau bleu (s’il s’avérait être du lapis-lazuli, pigment fort coûteux, cela prouverait que ce tableau a été commandé par un riche commanditaire), entourée de créatures célestes, anges ou figures allégoriques d’une représentation très humaine dans la partie inférieure, que l’on retrouve dans beaucoup d’œuvres de Frère Luc et qui permettent de donner un mouvement d’élévation et d’exaltation, lui-même renforcé par la composition en X du tableau. A la transition entre l’espace inférieur et supérieur on peut voir des angelots avec leurs figures enfantines et tout en haut, sur les colonnes, des séraphins rouges ailés. Frère Luc a pu ainsi se référer à la hiérarchie des anges. La Vierge a les mains jointes et les yeux levés au Ciel, élément que l’on retrouve chez Guido Reni (photo ci-dessous, musée des Beaux-Arts de Lyon) notamment, comme si le peintre représentait la vision intérieure de Marie qui voit ce à quoi elle est destinée.
La Trinité est représentée deux fois, d’une part par le Père, le Fils et le Saint Esprit mais aussi par son symbole, le triangle que l’on aperçoit derrière la colombe.
Le lutrin, au centre de la Trinité, ne représente pas un élément de décoration mais un élément liturgique qui rappelle le lutrin des frères. Dans le chœur de l’église du monastère, le lutrin sur lequel est posée la Parole de Dieu est un élément essentiel de la vie des moines. Dessus, un livre ouvert, sur lequel est écrit en Hébreu, Grec et Latin : « Livre de Vie ». Le Livre de Vie est mentionné plusieurs fois dans la bible, notamment dans le livre de l’Exode et dans l’Apocalypse. Il évoque le jugement et c’est donc en quelque sorte un avertissement que donne le frère Luc selon J.J. Danel.
Aujourd’hui, ce tableau du XVIIème siècle au chromatisme très vif est en bon état de conservation.
* les Récollets : les frères mineurs récollets forment un ordre mendiant de droit pontifical issu d’une réforme de l’ordre franciscain. Les premiers couvents apparaissent vers la fin du XVIème siècle
Une oeuvre de Frère Luc à Fourvière!
Suite à la journée d’étude autour du peintre Claude François devenu le Frère Luc, organisée par l’Association des Amis du musée de Fourvière, nous vous proposons une courte présentation du tableau exposé dans la chapelle saint Thomas Becket au sanctuaire de Fourvière qui vous donnera peut-être envie de découvrir cette œuvre et ce peintre.
Ce tableau de grandes dimensions, représentant l’Assomption de la Vierge et son couronnement, a longtemps été considéré uniquement comme un ex-voto offert par le clergé Lyonnais en 1817, dont on ne connaissait ni le peintre, ni la provenance.
Ce n’est qu’en 2015 qu’il a été identifié puis attribué officiellement comme une œuvre de Frère Luc. Appartenait-il à la riche collection d’œuvres du cardinal Fesch, oncle de Napoléon Bonaparte, évêque à Lyon au début du XIXème siècle ? C’est une hypothèse soulevée par Monsieur Bernard Berthod conservateur du musée de Fourvière. Il n’est pas non plus exclu que ce tableau ait été peint à Lyon pour le couvent des Récollets* de Lyon où se trouvaient des tableaux de Frère Luc, selon le père J.J. Danel spécialiste du Frère Luc qui est intervenu lors de cette journée.
Le frère Luc est né vers 1614 à Amiens, sous le nom de Claude François. Elève de Simon Vouet de 1631 à 1634, il part parfaire sa formation artistique à Rome de 1635 à 1639. Il réalise de nombreuses copies de maîtres notamment une Assomption de Francesco Bassano de l’église Saint Louis des Français. Raphaël, Annibal Carrache, Guido Reni ont une influence durable sur le jeune peintre. De retour en France il atteint une notoriété certaine, on lui prête une collaboration avec Nicolas Poussin. Puis en 1644, il rentre chez les Franciscains, c’est alors qu’il prend le nom de Frère Luc. La peinture se hisse pour lui au même rang que la prédication. Il est envoyé au Québec avec d’autres frères comme missionnaire. Il y réalise plusieurs tableaux. Il meurt en France en 1685. Les œuvres de Frère Luc sont nombreuses mais malheureusement peu sont datées et répertoriées.
Sur cette grande huile sur toile on peut voir la Vierge élevée et couronnée par la Sainte Trinité: Dieu le Père en blanc, Jésus à moitié couvert par ce tissu rouge évoquant sa Passion et sa gloire et le Saint Esprit représenté classiquement par une colombe. Si le dogme de l’Assomption est récent – il n’a été défini que par le pape Pie XII en 1950 – de nombreux textes officiels et apocryphes se mélangent au XVIIème siècle et sont un terreau pour la représentation de la Vierge Marie à cette époque. Ces écrits évoquent le couronnement de Marie par le Père, ou le Fils ou le Saint Esprit ou par la Trinité tout entière, ils évoquent un dialogue entre Jésus et sa mère, ils parlent de créatures célestes, d’anges musiciens, d’encens, de parfum, de lys, de colombes, de rameaux d’olivier… Certains éléments se retrouvent sur l’œuvre de Frère Luc qui a dû s’inspirer de ces textes et de toute la piété Mariale dans laquelle baignent les chrétiens du XVIIème siècle. L’ordre franciscain, auquel Frère Luc appartient, contemple particulièrement l’humanité du Christ où Marie tient une place privilégiée et l’on retrouve très souvent ce thème (assomption, couronnement de la Vierge) chez les franciscains, soit dans les écrits, soit comme ici dans la représentation artistique.
On voit la Vierge au centre habillée d’un manteau bleu (s’il s’avérait être du lapis-lazuli, pigment fort coûteux, cela prouverait que ce tableau a été commandé par un riche commanditaire), entourée de créatures célestes, anges ou figures allégoriques d’une représentation très humaine dans la partie inférieure, que l’on retrouve dans beaucoup d’œuvres de Frère Luc et qui permettent de donner un mouvement d’élévation et d’exaltation, lui-même renforcé par la composition en X du tableau. A la transition entre l’espace inférieur et supérieur on peut voir des angelots avec leurs figures enfantines et tout en haut, sur les colonnes, des séraphins rouges ailés. Frère Luc a pu ainsi se référer à la hiérarchie des anges. La Vierge a les mains jointes et les yeux levés au Ciel, élément que l’on retrouve chez Guido Reni (photo ci-dessous, musée des Beaux-Arts de Lyon) notamment, comme si le peintre représentait la vision intérieure de Marie qui voit ce à quoi elle est destinée.
La Trinité est représentée deux fois, d’une part par le Père, le Fils et le Saint Esprit mais aussi par son symbole, le triangle que l’on aperçoit derrière la colombe.
Le lutrin, au centre de la Trinité, ne représente pas un élément de décoration mais un élément liturgique qui rappelle le lutrin des frères. Dans le chœur de l’église du monastère, le lutrin sur lequel est posée la Parole de Dieu est un élément essentiel de la vie des moines. Dessus, un livre ouvert, sur lequel est écrit en Hébreu, Grec et Latin : « Livre de Vie ». Le Livre de Vie est mentionné plusieurs fois dans la bible, notamment dans le livre de l’Exode et dans l’Apocalypse. Il évoque le jugement et c’est donc en quelque sorte un avertissement que donne le frère Luc selon J.J. Danel.
Aujourd’hui, ce tableau du XVIIème siècle au chromatisme très vif est en bon état de conservation.
* les Récollets : les frères mineurs récollets forment un ordre mendiant de droit pontifical issu d’une réforme de l’ordre franciscain. Les premiers couvents apparaissent vers la fin du XVIème siècle